En 2008, lorsque nous imaginons la galerie, avec Hanane Hilmi, nous pensons d’abord à la photographie documentaire, un territoire collectif et peu représenté dont je me sens proche, j’ai longtemps été reporter.
Le lieu que nous choisissons, ou plutôt que le hasard nous propose, se niche dans le 7e arrondissement, dans la rue Las Cases, non loin du musée d’Orsay. Ce lieu paisible, intime, est devenu bien plus qu’une adresse : une oasis de lumière.
Impossible d’y accrocher des dizaines de photographies, il faut être précis et rigoureux tout en étant fidèle à l’artiste, à sa fantaisie, à ses rêves, aussi à ses exigences. C’est un engagement réciproque. Ce n’est pas un challenge, mais une expérience passionnante, renouvelée à chaque nouvelle rencontre. L’accrochage reste, c’est encore vrai, l’un des meilleurs moments de ma vie de galeriste. Un moment surprenant, exaltant, soudain tout s’emboîte, tout prend sens, tout s’éclaire, les tirages s’animent, c’est le grand mystère de la photographie.
Au fil du temps, nous accueillons des sensibilités et des esthétiques différentes, et ces points de vue, parfois inattendus, provoqueront des échanges avec nos visiteurs. Des amis deviennent collectionneurs et des collectionneurs deviennent des amis. Cette aventure vers l’ailleurs, pas seulement géographique, mais aussi numérique, nous a porté chance.
En 2023, in camera fête ses quinze ans avec une exposition riche de trente-deux auteurs. Trente- deux artistes. Trente-deux tirages. Un jeu de cartes sans reines ni rois.
En tout cas, le portrait d’un groupe singulier et indiscipliné, volontaire et résistant, auquel Hanane et moi sommes très attachés.
Jean Noël de Soye